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Nouvelle ère de la désinformation : lutte et responsabilisation des plateformes

L’expression « fake news » a été popularisée en 2016 à l’occasion de la campagne pour l’élection présidentielle américaine. Avec l’essor des médias sociaux, la maîtrise de l’information devient de plus en plus complexe. La lutte contre la diffusion à grande échelle d’informations erronées est désormais au cœur des débats. Dans ce contexte de prise de conscienceles gouvernements mettent en place de nombreux leviers. L’objectif face à cette nouvelle ère de la désinformation ? Sensibiliser, réguler et maîtriser l’information. 

La désinformation, un nouveau concept ? 

La notion de « nouvelle fausse » renvoie à la diffusion d’une information délibérément erronée et destinée à servir un objectif mercantile, idéologique ou politique. L’expression est vulgarisée pour la première fois en France dans la loi du 27 juillet 1849. Cette dernière vise à condamner « la publication ou la reproduction faite de mauvaise foi de nouvelles fausses de nature à troubler la paix publique ». 

Récemment, Fabrice FRIES, PDG de l’AFP a publié L’emprise du faux. Désinformation : le temps du combat[1],  ouvrage qui pose un regard nouveau sur la désinformation dans les médias au quotidien. Selon lui : « notre époque n’a rien inventé : le faux est consubstantiel de l’histoire des médias, toutes les figures de la désinformation contemporaine sont en réalité anciennes, notre volonté de croire – qui unit toutes ces catégories – est éternelle. Si l’arrivée des réseaux sociaux a apporté des changements, ce n’est pas là. »

D’ailleurs, en 1922, l’historien Marc BLOCH s’accordait déjà à dire : « Une fausse nouvelle naît toujours de représentations collectives qui préexistent à sa naissance ».[2] Le faux n’est donc pas nouveau. Cependant, la révolution des réseaux sociaux l’a banalisé. Avec un accès quasi instantané, chacun devient acteur de l’information. Fabrice FRIES affirme ainsi : « chacun devient en puissance un média, le droit de prendre la parole en public s’élargit à la société tout entière. La sélection et la hiérarchisation des discours s’effacent »[3].

Pourquoi ne faut-il plus parler de « fake news » ? 

Selon Fabrice FRIES[4], parler de « fake news » pour évoquer la désinformation soulève un problème : « Les fake news ne sont pas systématiquement des fake : l’information peut être exacte mais sortie de son contexte, c’est même le cas le plus fréquemment rencontré. Ce ne sont pas nécessairement des news : ce peut être par exemple un assemblage disparate de théories ». On préférera ainsi parler désormais de désinformation pour évoquer ces idées d’information erronée, inexacte ou même fabriquée. 

D’autre part, il faut distinguer les nouvelles fausses des faux articles ou sites d’actualité. Le terme de « fake news » est de plus en plus remis en question. Les débats sur la désinformation évoquent notamment la question du flou sémantique. Donna HALPER, ancienne journaliste et professeure de communication politique expliquait en 2015 que « certaines personnes ne réalisent pas qu’elles lisent un faux site d’actualité, car la plupart [de ces plateformes] font en sorte d’avoir l’air dignes de confiance. Et c’est seulement si vous lisez l’avertissement, souvent placé tout en bas du site, que vous réalisez que c’est du faux, et non la réalité. »

Lutte et prévention contre la désinformation 

De nombreux services de vigilance et de protection sont mis en place dans cette nouvelle ère de la désinformation. C’est le cas par exemple du Viginum, un service gouvernemental de protection contre les ingérences numériques étrangères. En septembre 2021, la France a également créé une commission « Les lumières à l’ère numérique ». Cette dernière a rendu au mois de janvier un rapport concernant la lutte contre la désinformation. Il a été présenté dans l’émission de Guillaume ERNER « L’invité(e) des matins »[5] (Lutte contre la désinformation : anciens usages, nouveaux visages, avec Romain BADOUARD et Jean GARRIGUES) .

L’un des axes de ce rapport se porte sur l’éducation. Depuis peu, la pédagogie du numérique s’intègre dans les enseignements des lycées français. Il est en effet nécessaire de former l’ensemble de la population à la détection et au décryptage de l’information. La Belgique et le Luxembourg ont en parallèle lancé le 15 février dernier la plateforme EDMO Belux. Financé par l’UE, ce projet est le fruit d’une collaboration intercommunautaire et multilingue entre la Vrije Universiteit Brussel et l’Université Saint-Louis – Bruxelles et Mediawijs. L’AFP, RTL Luxembourg, l’EU DisinfoLab et l’Athens Technology Center y ont également collaboré. EDMO Belux annonce publier chaque jour en cinq langues sur son site plusieurs vérifications de faits. L’objectif de cette plateforme est de détecter, analyser et dévoiler les campagnes de désinformation au niveau européen ou paneuropéen. Cette plateforme vise également à promouvoir l’éducation aux médias au travers de vidéos de formation, d’événements et de campagnes.

Les réseaux sociaux évoluent aussi du fait de nouvelles obligations. En France par exemple, les plateformes sociales doivent se réunir chaque semaine avec l’ARCOM pour faire des points sur les processus de lutte contre la désinformation mis en place. La plateforme Meta a d’ailleurs lancé un centre opérationnel capable de réagir sur l’ensemble des sites du Groupe face à des sujets de désinformation. Autre exemple, cette fois au Brésil : le Tribunal supérieur électoral a annoncé en mars dernier que la plateforme de discussion en ligne cryptée Telegram avait rejoint un accord signé avec d’autres applications de messagerie pour lutter contre la désinformation avant la présidentielle d’octobre.


[1] Fabrice FRIES, « L’emprise du faux. Désinformation : le temps du combat », Éditions de L’Observatoire, avril 2021, page 36

[2] Marc BLOCH, « Réflexions d’un historien sur les fausses nouvelles de la guerre », Éditions Allia, 1999

[3] Fabrice FRIES, id., page 38

[4] Fabrice FRIES, id., page 49

[5] Guillaume ERNER, émission “L’invité(e) des matins”- Lutte contre la désinformation : anciens usages, nouveaux visages. Avec Romain BADOUARD et Jean GARRIGUES, France Culture, 12 janvier 22

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